J'apprends qu'un gars va venir nous chercher à l'aéroport de Nice.
Ah.
Ok. 
Il va nous tenir compagnie pendant les 4h de transit vers le bateau. J'en demandais pas tant... 
Je ne le connais pas vraiment, je l'ai croisé 1 fois en tout et pour tout. Il prend des nouvelles une fois par an à peine et le mec, vaguement dans la région 06 à cette période, va faire 2h de voiture pour "nous voir".
...
J'en reste bouche bée.

- "T'es pas obligé de faire toute cette route hein...
- Oh c'est rien, vous faites beaucoup plus vous...
- ..."


waOW... 
Quasi envie de le serrer dans mes bras... Tant de gentillesse et générosité... Pas donné à tout le monde HEIN...
Parce que moi... là... faut pas oublier...
QU'il pleure dans mon coeur 
Comme il pleut sur la ville (...)
Il pleure sans raison
Dans ce cœur qui s'écœure.
Le bonheur, la douceur, la joie, 
Tiennent entre les bras mêlés ; 
Pourtant les coeurs sont isolés 
Et las comme un rameau qui ploie.
Pourquoi est-on si triste encor 
Quand le destin est favorable, 
Et pourquoi cette inéluctable 
Inclination vers la mort ?...
Ce soir ma vie me fait mal
Tristesse tu t'empares de mon coeur
La joie fuit ma tête en pleure
Un voile recouvre ma vie si pâle
Solitude dans le vide de mes nuits
Criant ma peine par des larmes silencieuses
Défiant la haine des heures pernicieuses
Chercher en vain une issue à l'ennui...


(tu me dis si ça se voit que j'en fais trop)

Bon là, mes gentils collègues s'inquiètent pour moi. 
Ils me disent "Vas pas en France!!" 
Trop "risqué" comme pays.
J'avoue que là, avec le coup du curé... je sais pas s'il faut en rire pour garder une distance, ou ignorer et regarder ça comme un fait divers pour éviter de simplement PANIQUER.

Avec la chance que j'ai, "ils" sont en train de planifier leurs affaires, et prévoient de mettre une bombe pile pendant que je serai en plein dans mes achats de charcutaille...
(En vrai je suis impatiente de partir uniquement pour manger du reblochon et du St Nectaire, (qui est TOUJOURS bloqué à la douane ici), avec un bon verre de st Veran. J'en ai les larmes rien que d'y penser)
Et puis le FLNC veille et nous protège on dirait...
Ouf.

En même temps tout le monde me dit que je ne risque rien, ils ne vont pas retourner faire un coup au même endroit. Tu sais où. Une ville qui a perdu tout son charme à jamais. Là où personne ne veut me dire bonjour... là où je regarderai le temps s’égrener... Seconde après seconde. Noyée dans une mare de désespoir... Là où je cheminerai le coeur lourd... Le bruit sourd de mes pas résonnera au plus profond de moi.... Ma tristesse dessinera de sombres mirages... 
Sans répit, de noires pensées m'assaillent et bientôt je défaille.

Houlala J-2 semaines. 
J'ai hâte finalement.

Hey j'ai reçu ma carte de résident !
Per-ma-nent.
Tchao les cocos! 
Déso mais je reste.

La dernière étape c'est la citoyenneté. J'ai encore 5 ans à faire pour y avoir droit. J'avoue que ça m'attire pas spécialement. Les seuls avantages supplémentaires à mon statut actuel : voter, et aller aux US sans visa.
Bof hein.
Toutefois, avec l'air ambiant légèrement putride qui se propage dans le monde, cette bonne vieille haine qui s'insinue tranquillement dans les recoins, au final me dis qu'être rattachée à ce gentil pays de bisounours où la vie est couleur pastel... Je vais réfléchir finalement.
Je prendrais ça en récompense des hivers et les -20 degrés que je me tape chaque année...

En étant la française de service je me récupère tous les commentaires, qui se rapportent de près ou de loin, sur tous les sujets. Les bons comme les mauvais. Le lendemain de la finale perdue ils m'ont demandé si j'allais bien. 
Oui les gars quand même...
Et ce matin... ils me regardent comme si j'étais en deuil. Même que mon collègue que j'aime pas m'a demandée si je connaissais des gens à Nice. J'ai répondu que non. (ce qui n'est pas totalement faux non plus,  mais pas vraiment le moment de s'étaler hein)
A force je me demande si on va s'habituer. Parce-que mine de rien on commence à voir les différences dans les réactions. La 1ere fois t'es sous le choc. La 2e fois t'es touché, mais t'as comme des leçons de la dernière fois.
Alors la 3e fois les clans se marquent assez rapidement. Les éternels nunuches qui souhaitent du courage à des "amis du sud" avec des emojis.
Non. Si tu connais vraiment des gens, si tu es inquiet, tes amis tu les contactes en direct, pas avec un tweet pourri.
Et puis y a les autres, qui me redonnent foi. 

Je parle même pas de tous les amalgames pourris de bar pmu (elles sont ou les fameuses marches de la cohésion? La grande unité nationale du tous ensemble??), et les politiques qui se disent qu'aller les bombarder ça réglera les choses... 
Mais les mecs... vraiment??? Ils sont censés être dans le secret des dieux, ils savent tout avant tout le monde et ils pensent vraiment ça? Comment être aussi déconnectés??? Ça va finir par se voir que tout est négocié...

En tout cas, ma nouvelle famille s'inquiète pour moi (elle au moins...) et me dit :

C'est encourageant et HYPER motivant... 
Vraiment bien choisi mon année.

#paixnice  

Je fais rien qu'écouter de la musique triste... C'est chiant.
(je veux passer à autre chose bordel !)

​
Ils sont gentils ils m'ont souhaitée une bonne fête nationale.
Je voulais m'autodéclarer fériée, mais vu que j'ai pas fait grand chose cette semaine je me suis dit que je pouvais pas trop. (C'est pas mon genre d'exagérer...)
Je suis rentrée comme si de rien. En chantonnant durant ma petite marche quotidienne sous les arbres verdoyants. (et dans cette moiteur dégueulasse) (42 degrés ça commence à être chaud) 
J'ai ouvert twitter. Comme d'habitude.
J'ai vu 1 photo "je recherche machine urgent". Puis une autre. Puis une autre. C'est quoi ce bordel? C'est fou tous ces gens qui se perdent... 
Et dessous paf direct dans la gueule #attentatnice #niceattaque
Whaaaat???
Vraiment ravie d'apprendre une telle nouvelle. C'est pile ce qu'il me fallait.
(Je précise au cas oú que je n'y suis pour rien hein... On pourrait croire comme ça... Par vengeance mais c'est pas moi j'le jure)
Je tiens à te dire Destin, que c'est bon, j'avais déjà eu quelques indices ces derniers jours, tu m'avais confirmé que je n'ai absolument rien à faire dans cette ville, mon cerveau mou avait fait les déductions nécessaires, j'avais déjà plus envie d'y aller, et m'imaginais passer les quelques heures là-bas en position fœtale à regarder l'horizon. Surtout sans se retourner. Vraiment pas besoin d'en rajouter hein.
Le hasard faisant qu'à midi justement mes collègues me posaient des questions sur mes vacances d'été, et mon retour en "terre sacrée". ils ne comprenaient pas pourquoi je ne sautais pas de joie. (Parce-que c'est fucking plate de se taper les vacances en famille pardi) Parce-que mes vacances de l'année je pourrais les passer ailleurs dans le monde (je l'ai déjà dit je sais) et parce-que j'ai surtout peur d'aller en France tout simplement, mais ça, je ne sais pas trop comment l'exprimer, ni dans quels mots.
D'une façon générale les mentalités sont différentes, je ne suis plus du tout habituée. J'ai aussi clairement changé. Et puis la France, depuis 3 ans, on va pas se mentir, c'est pas vraiment youpi pouet pouet niveau ambiance. J'ai peut-être/sûrement tort, je me base sur des échos, des journaux. (Je me rappelle des émeutes en banlieues et le "Paris à feu et à sang" alors que rien du tout hein...)
J'ai peur de la morosité, de la lourdeur générale, des gens démoralisés, effrayés(?) Mais bon, si autant de français que je vois ici ne veulent pas rentrer, et encore plus qui veulent partir, c'est pas pour rien, doit y avoir un fond de vérité. Et puis c'est pas comme si on avait déjà vu d'autres pays européens sombrer...
Et Parce qu'il m'est impossible de juste faire la touriste, juste regarder les monuments en flânant le nez en l'air. Enfin bref, je sais pas comment dire tout ça... (Ya que les gens qui vivent ailleurs qui comprendront (ou en Allemagne :) )

Je suis un peu gênée de l'utilisation du mot attentat. On n'en sait rien il est trop tôt. Le bilan est déjà beaucoup trop lourd. Alors cette fois j'ai décidé d'éviter. Je ne veux pas voir les images. Je ne veux pas voir de visages. Je ne veux pas voir de gens fuir sous les arcades (celles là c'est trop tard) Je ne veux plus être touchée. Je suis fatiguée de m’inquiéter. Parce que ça fait chier de voir un si beau pays se saborder. (Si de loin c'est de ça que ça a l'air).
Parce-qu'au fond on va se l'avouer, quand j'évite, que j’appréhende, que ça m'énerve, que je déteste, c'est parce qu'au fond j'aime profondément.
(Et que je pourrais dire ce que je veux, la France et Paris et les gens que j'y ai laissés me manquent terriblement.)
(mais ça me fera pas rentrer pour autant)

​
J'ai des nouveaux clients.
C'est cool.
Compliqué parce-qu'ils ouvrent un resto, je connais absolument pas ce secteur, ya tout à mettre en place, et je travaille à temps plein ailleurs.
Mon problème: j'ai pas envie de travailler plus, (j'ai un mood de merde en ce moment), alors je travaille moins chez les architectes. 
Et je m'en veux un peu, c'est pas très réglo.
Mais maintenant qu'on est 12 dans le bureau ça commence à faire beaucoup et c'est plus du tout adapté. Trop de bruit, trop de commentaires, ils me fatiguent, m'usent, m'énervent tous. Même mon patron.
Quasi 2 ans j'arrive bientôt à ma limite.
Je pense alors à mon plan idéal, trouver un bureau/client différent, pour chaque jour de la semaine.
"Moi je dis ça se tente"...

Ma plus grosse déception du jour n'est pas la lamentable défaite en finale... 
Ni le fait que j'ai du enchainer sur un souper chez des gens dont je déteste les enfants (tellement mal élevées...) 
mais que (sans doute l'unique chance de ma VIE...) le match à Bastia se déroulera finalement le vendredi 12 août à 20h00. 
Je descends du bateau à 19h00.
Moi je dis ça se tente...
(mais on me répond que non, pas après 18h de voyage) 
(pfff...)

(nan mais franchement:
- vol de nuit : on dort
- 4h d'attente arrivée en sol français : sieste
- 5h de bateau : re-siseste
= la patate !!!)

​La dernière fois que j'ai touché une raquette de tennis = sept 2013.
Initiée par quelqu'un qui prenait ce sport bien trop au sérieux, j'ai eu du mal à trouver ça fun, rapport qu'aucun réel échange n'avait lieu. Il m'avait même envoyée chez un mec précis pour corder ma raquette... (50 balles chez decathlon est-il utile de le préciser, tu crois vraiment que j'allais acheter celle de Roger F.???) pour que la tension du cordage soit bien précis blablabla...
Hey tu m'as bien regardée?
Bref, motivée, j'y suis allée quelques dimanche de l'été 2013, qui furent là encore loin d'être festifs, passant plus de temps à s'engueuler "mais pourquoi t'envoie la balle là-bas alors que je suis ici???!!!!"
"Oh j'fais c'que j'peux hein!"
J'ai un peu abandonné, me suis dit que ça marcherait pas sans prendre de cours avec un pro. (J'en ai cherché en arrivant ici, mais c'est très vite pris d'assaut apparemment)
Habitant à 10 min a pieds de terrains, et après 2 ans de maturation, il était temps de retenter. Après la découverte des balles appelées "balles pour enfant ET débutant". Ou plus communément appelé "personne normale ayant des bras de la même taille sans muscle spécialement supérieur à d'autre" (parce-que passe le principal de sa vie à cliquer sur une souris).
Alors quand hier, j'ai pu réellement taper dans une balle plusieurs fois d'affilée (!!!) j'avoue que ça change tout, ça devient soudain tellement plus intéressant. Et j'avoue que mon petit coté compétitif n'est pas enfoui bien profond et ressort assez rapidement dans ces cas là. Après, faut pas regarder ce qui se passe sur les courts voisins, quand ils comptent le score pis tout...
1h on se rend pas toujours compte au quotidien, mais c'est fou comme ça peut être long parfois...

J'ai mal là.

Il m'a fallu partir à 6000km pour découvrir les joies de la campagne, les plaisirs de la nature, les bienfaits du calme et du silence.
Depuis que je vis dans ce pays, je me suis découvert une passion pour la rando
(Enfin "passion" = 1 week-end de temps en temps) (= surtout dès que je peux fuir les humains je courre)
Sauf que j'ai toujours pas investi dans le matos adéquat, et quand je me retrouve à l'entrée des sentiers et que je vois les locaux... Bah j'ai toujours l'air d'une touriste.
Mais bon ça m'empêche pas de marcher. Ça m'empêche pas de me tromper de chemin, et surtout de surestimer mes capacités.
On a pris le chemin de "ché pas quoi d'orignal" (ya toujours des noms ridicules en forêt) 

3h. 

Ok faisable.
(On a bien choisi en + parce-que 2h on s'est dit pfff trop court, et puis 5h ouh laaaa peut-être trop long).
Et comme apparemment je ne semble pas apprendre de mes erreurs passées, ce n'est pas trop le temps ou les kilomètres qu'il faut regarder mais le dé-ni-ve-lé. Tu pars de 520m, et direct dès le début tu descends à 480. 

Ok déjà why? Pas logique merci.
Pour remonter à 700 d'un coup!!! Paf dans les mollets.
C'est un soit disant site seeing.

Merci la déception.

Vu que t'en as un peu chié pour monter mais que ça restait tout de même très faisable (je parle pas de ceux qui m'ont doublée en courant....) tu te dis que plus haut y aura forcément mieux. Tu monte à 810. (je suis quasiment prête pour l'Everest)
Ça fait 2h, ça commence a être un pti peu relou, et sur la carte le chemin passe de "difficile" à "très difficile". Mais au milieu de la montagne, que tu avances ou que tu fasses demi tour, dans tous les cas va falloir continuer à crapahuter. (J'ai vachement changé je me plains plus!) (La montagne ça vous gagne!)
Le petit plus, la "cerise sur le sunday"comme on dit ici, il pleut, il fait 15 degrés, ya que des rochers partout. Je m'attends a voir un gorille sortir des feuilles. Histoire de pimenter. Avec un temps pareil, les animaux, pas cons, eux, ils sont restés au chaud. Le seul être vivant que j'ai vu: un escargot. Tu parles d'exotisme.

Donc j'arrive en haut et...

Breathtaking. 

Totalement différent du 1er. 
Tout ça pour ça. 

Ok. Merci au revoir.

Après cet époustouflant panorama, faut redescendre. 1h à se péter les pieds entre les racines et la caillasse. Je commence à fatiguer sévère. Ça n'en finit pas. Et? je glisse dans la terre et me tors la cheville of course!
Mais faut continuer à descendre on n'est pas arrivés. Je rêve qu'un hélico vient me chercher. (Ça fait un moment que je me demandais comment on fait quand on se blesse pour de vrai, au milieu de nulle part. Sachant que les téléphones ne fonctionnent pas. Après le reportage sur un véto qui expliquait comment on faisait une atèle à un chat avec 2 bâtons d'esquimau je me sentais prête. Mais au milieu de la forêt, en traversant la rivière, je me suis dit que j'étais peut-être pas si opé pour replacer une fracture ouverte...) (#humilité)
Donc je fatigue vraiment, j'ai les jambes qui flagellent et je fais comme je peux sur un pied. Un vrai plaisir. Là ça fait +3h (non stop) (bah oui la moindre souche ou rocher est mouillé, y avait pas vraiment de coin repos) C'est bon ça commence à être pénible. Les endorphines tu les sens plus. Le plaisir est resté la haut sans te suivre. Heureusement ya qu'un chemin, ça t'évite de réfléchir (et là je pense à "The Barkley Marathons" sur Netflix, une course de 160km sur 60heures non stop. Je suis "quasi" dedans.)
C'est alors que j'entends enfin la route, le soleil sort, la vie. 
Je suis gelée, trempée, les chevilles pleines de terre, j'ai mal aux quadri, mais contente aussi.
Promis la prochaine fois j'aurais des vraies chaussures. 

(Mais moi j'veux surtout un pti couteau, parce qu'on sait jamais.)

Il y a 66,6 millions d'habitants en France en 2016,
et on se demande vraiment pourquoi ça va pas?